L’Oustau de Baumanière
3 étoiles DESTINATIONS FRANCE GASTRONOMIE Les Baux-de-Provence RESTAURANT ÉTOILÉ

Sous le ciel des Alpilles : un poème d’amour et de saveurs à L’Oustau de Baumanière

Un matin de lumière à l’Oustau de Baumanière

Le soleil se lève doucement sur les Alpilles. Lorsqu’on quitte Les Baux-de-Provence, la route serpente entre les oliviers et les pierres blanches, guidant nos cœurs vers un nid pas comme les autres : L’Oustau de Baumanière. Une façade qui respire l’histoire, murmure la tradition, et accueille comme un poème silencieux. Une étoile brille sur cette adresse mythique – mais ici, la plus grande lumière vient de ce qu’on y vit.

Nous arrivons en famille, ma bien-aimée, notre enfant qui s’éveille à peine à 3 ans, et moi, porteur d’un désir simple : goûter la magie de ce lieu. L’air est doux, chargé des promesses de la Provence. Dès notre première respiration, on sent le tumulte du monde s’éloigner. La pierre blonde, le ciel azur, tout concourt à ralentir le temps.

L’accueil : un conte délicat

La porte s’ouvre sur un univers de raffinement tranquille. Une équipe, harmonieuse, nous reçoit sans geste ostentatoire, mais avec une chaleur vraie. Le regard se fait attention, les gestes ajustés. On installe notre enfant dans une chaise de bois tendre, un petit coussin moelleux à hauteur de son visage curieux. Elle observe, déjà fascinée.

Ici, tout est allégeance à la beauté des instants partagés. Le silence coupé uniquement par le bruissement des pages qu’on glisse à la table voisine – un livre déposé, ouvert vers la lumière, comme une invitation à la rêverie.

Le prélude : murmure des pages et des sens

Avant même les premiers mets, l’atmosphère parle. Une nappe blanche, des couverts en équilibre, et ce léger grésillement du feu dans la cheminée. Nous glissons la couverture qui accompagne les lecteurs sur nos genoux—et tandis que nos doigts l’effleurent, l’air se fait plus dense.

Le petit menu ouvre la scène. Un amuse-bouche nous est offert : fine tartelette de tapenade d’olive verte, brins de thym frais, poussière de fleur de sel. Un écho discret à la Provence, qui éclot à chaque bouchée. Notre fille, avec des yeux curieux, goûte ; sa patience s’étire, suspendue au parfum.

Un menu comme un roman

Chaque plat est un chapitre, un poème en soi, un récit gustatif. Le premier acte se déroule avec une langoustine Moureaux, filée dans une chantilly légère d’asperges vertes. Posée sur un velouté tiède, elle chante en vert et blanc. Le contraste des textures – croquant, tendre, aérien – ouvre un espace de pure émotion. L’instant où le temps ralentit : le monde devient page, le temps une lecture infinie.

Notre enfant, les yeux écarquillés, tend sa petite fourchette : la magie opère. Elle goûte, hésite ; puis un sourire faufilé traverse son visage. Elle nous regarde, curieuse, déjà lectrice d’un monde nouveau.

Entre deux chapitres

Un granité de pastèque à la verveine arrive comme un haïku. Il rafraîchit la langue, anime le silence. Un interlude, un souffle, une respiration. Le genre de pause salutaire qui oblige à reprendre le livre, tendre la page, contempler le monde.

Puis, l’histoire se fait plus intense. Le plat de poisson : omble chevalier, peau croustillante, posé sur un lit de purée de courgette à l’huile de truffe blanche. Autour, éclats de cédrat confit, gouttes d’hibiscus. Un tableau délicat, mais puissant, traversé de notes de terroir. Le mélange de la chair délicate et de la terre riche nous rappelle que la lecture, comme la gastronomie, est aventure et douceur mêlées.

Le cœur du récit : intensité poétique

Le pigeon, issu de chasse respectueuse, arrive comme un climax. Il est rôti au foin, servi avec une émulsion de foie gras, morilles farcies, purée de topinambour. Chaque bouchée est un vers, dense, profond, ancré dans la terre provençale. La cuisson est parfaite, les saveurs s’entrelacent, dialoguent. C’est un moment où la langue lit un poème ancien, et le cœur entend.

À notre table, silence. Seuls les yeux parlent. Les mains cherchent le pain, les regards croisent les émotions. Notre enfant, fascinée, touche la purée du bout des doigts, goûte une petite morille… Le voici, cet éveil discret : l’enfant devient lecteur du monde.

Une caresse crémeuse : le fromage

Un plateau de fromages arrive. Trois variétés choisies avec soin, affinées comme des chapitres rares. Un brie au lait cru, un petit banon frais, et un chèvre de Roquefort. Chaque fromage chante un terroir, chaque texture est une phrase qui se savoure. Nous en lisons chaque note, en laissant l’air nous guider.

Notre fille rejoue la scène du pain et du beurre : avec sérieux, elle tartine, goûte. Le fromager et l’équipe l’observent avec tendresse. Dans cette bulle gastronomique, même l’apprentissage devient célébration.

Le dénouement : douce apothéose sucrée

Puis vient le dessert. Une sphère de chocolat blanc, cœur framboise, repose sur un lit de fine glace à la lavande. La cuillère l’approche. Elle craque. L’intérieur se révèle dans une cascade rouge-violette, vive. Une première bouchée, et le monde s’illumine. C’est frais, acidulé, aérien… on dirait un vers suspendu dans la bouche.

L’enfant s’exclame, émue ; nous sourions. Nous lisons ensemble ce poème sucré, ensemble. Elle plonge sa cuillère, se pare de la couleur, et rit aux éclats. Un petit moment d’innocence, capturé pour toujours.

Un dernier chapitre : l’après-repas

Le café est servi. L’instant est ralenti, étiré comme un dernier paragraphe avant la fin du livre. Nous restons là, savourant, échangeant : qui aurait cru qu’un repas puisse faire vibrer à ce point ? Un repas, un livre, un moment à trois.

Puis, à regret, nous nous levons. L’équipe nous accompagne jusqu’à la sortie, saluant avec cette même délicatesse qu’à l’entrée. Nous reprenons la route, le cœur plein, les pensées légères. Le soleil est plus haut. Le Livre de cet instant se referme doucement.

Épilogue : une ode à la lecture

Ce déjeuner à L’Oustau de Baumanière n’était pas seulement une expérience culinaire : c’était une ode à la lecture – lecture du goût, lecture des émotions, lecture du temps partagé. Chaque plat, chaque geste, chaque sourire était un mot, un vers, un blanc à lire entre les lignes.

Notre enfant, lecteur émergent, a découvert que l’on peut lire avec des papilles, goûter des histoires, s’émerveiller en silence. Elle apprend que l’émotion naît aussi dans les textures, les parfums, les instants offerts – comme un livre qu’on feuillette à voix basse.

Nous sommes repartis, main dans la main, le cœur léger, convaincus que la gastronomie, lorsqu’elle est vécue ainsi, devient littérature. Un art de vivre, une lecture partagée, un poème éternel.


L’adresse
L’Oustau de Baumanière
13520 Les Baux-de-Provence, France

Site web
https://www.baumaniere.com/gastronomie/loustau-de-baumaniere/

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