Un matin de printemps, entre poésie urbaine et promesse d’ailleurs
Lyon s’éveille doucement. Les pavés encore tièdes de la Croix-Rousse chantent sous nos pas, comme pour nous guider. Nous sommes trois. Deux amants d’hier devenus parents aujourd’hui, et notre enfant, curieux petit explorateur de trois ans aux yeux grands ouverts sur le monde. Ce dimanche de mai, nous cherchions un lieu hors du temps. Un endroit qui ne soit ni bruyant ni figé. Un lieu qui respire, qui vibre, qui parle au cœur autant qu’au palais. Nous l’avons trouvé. Il s’appelle Le Limonadier.
La montée vers la Croix-Rousse a ce quelque chose de romantique, un souffle d’ancien quartier ouvrier devenu repaire d’artistes, de poètes et de flâneurs. Les murs colorés, les escaliers sans fin, les petits commerces de bouche, tout nous murmure que la vie peut être simple et belle. Ce quartier a une âme, et ce matin-là, elle semblait nous attendre.
L’entrée dans le lieu : un monde à part, à hauteur d’âme
9 rue Justin Godart. Une adresse que l’on pourrait manquer, tant elle se cache avec modestie. Mais dès le pas de la porte franchi, une chaleur familière nous enveloppe. Le bois des tables, la lumière douce filtrant à travers les vitres, les sourires sincères du personnel… Tout ici semble prévu pour qu’on se sente attendu.
Au rez-de-chaussée, un bar à tapas réinvente la convivialité. Douze bières pression nous saluent derrière le comptoir, comme des amis de longue date. Des vins nature, des cocktails inspirés de spiritueux français… Mais ce matin, nous montons à l’étage.
Notre fils grimpe les marches comme on entre en scène. Il pressent que quelque chose de beau l’attend. Chaque détail a été pensé pour éveiller les sens. Des fleurs sèches, des assiettes aux formes imparfaites, des nappes sans rigidité mais avec charme. Il y a de la vie, il y a du goût, il y a surtout du soin.
L’instant suspendu : un brunch comme un conte
La salle est petite, intime, presque confidentielle. Nous nous installons près d’une fenêtre donnant sur les toits. Une chaise haute arrive, suivie d’un coussin moelleux. Notre enfant reçoit un menu dessiné à la main, avec des animaux rigolos présentant les plats. Une attention poétique. Une invitation à découvrir.
Les plats défilent, lents et généreux. Une frittata aux herbes folles. Un houmous de betterave qui tache les doigts et fait rire. Une brioche perdue, caramélisée à la perfection. Et ce granola maison, doux comme un matin d’été.
Chaque bouchée est une nouvelle histoire. Des œufs mollets nappés de crème de parmesan et de ciboulette. Des pommes rôties au sirop d’érable qui fondent sous la langue. Des légumes croquants sublimés par une vinaigrette à la noisette.
Notre fils goûte, teste, joue avec les textures. Il trempe ses doigts, puis ses lèvres. Il aime. Il recommence. Nous le regardons, silencieux, le cœur gorgé d’une joie simple. Un instant suspendu, où l’on mange lentement, en se regardant dans les yeux.
Une cuisine éthique, une ode à la terre
Ici, tout est pensé. Les produits sont bio, locaux, de saison. La carte change chaque semaine, comme un poème adapté à la météo, à la lumière, à l’humeur. Moins de 10 % des plats contiennent de la viande. Pas de gaz en cuisine. Juste l’envie de bien faire, de bien nourrir.
Les assiettes racontent des histoires de terroirs, d’engagements, de respect. Le pain est encore tiède, craquant sous les doigts. Les beurres sont parfumés, l’huile d’olive fruitée. Le moindre ingrédient semble avoir été choisi pour réveiller les papilles, mais aussi les consciences.
On sent dans chaque assiette une bienveillance presque maternelle. Une main qui cueille, qui respecte, qui aime. Le chef n’est pas en salle, mais il est là, présent dans chaque bouchée.
Notre fils mord dans un cookie au chocolat noir. Ses doigts s’émiettent. Il lève les yeux. « C’est bon, maman. » Il ne sait pas qu’il vient de résumer l’instant.
Une maison où l’on se sent chez soi
Le repas touche à sa fin, mais le temps s’étire. Personne ne presse. Les serveurs passent, laissent un mot, un clin d’œil à l’enfant. On parle vins, saisons, engagement écoresponsable. On parle vrai.
Un dessert arrive comme un dernier vers : une panna cotta à la fleur de sureau, douce comme une chanson oubliée. Nous la partageons à trois, cuillère contre cuillère. Ce moment n’est pas juste un repas. C’est un récit. Une scène gravée.
Notre fils découvre les arômes, les silences, les plaisirs simples d’un lieu qui respecte l’enfant autant que les adultes. Il est chez lui. Nous aussi.
Quand le monde ralentit pour mieux aimer
En redescendant, notre fils court vers les tonneaux. Il rit. Nous, nous savourons un dernier instant au bar. Un café, un regard. Ce lieu nous a offert bien plus qu’un repas : il nous a offert une respiration.
Là-haut, entre ciel et terre, nous avons compris que la gastronomie pouvait être un acte d’amour.
Nous sortons, main dans la main, comme dans un film dont on ne veut pas voir le mot « fin ». La ville nous attend, mais quelque chose en nous est changé. Nous avons goûté à l’harmonie. A la lenteur. A la beauté d’un repas offert comme un poème.
Et déjà, une promesse s’esquisse : nous reviendrons.
Le Limonadier
9 rue Justin Godart, 69004 Lyon
Tél : +33 4 51 24 34 31
https://lelimonadierlyon.fr/fr